En 2018, le Sénat s’était opposé à une proposition de loi du CRCE visant à ne plus prendre en considération les revenus du conjoint pour le calcul de l’AAH, l'allocation aux adultes handicapés. Pourtant, le 3 mars, après plusieurs heures à débattre au cours d’une séance publique, les sénateurs ont fini par donner leur accord à une proposition de loi. L’AAH sera donc désolidarisée des revenus du conjoint au sein des foyers français.

 

Une décision découlant des nombreuses revendications

 

Créée en 1975, l’AAH est une aide financière permettant aux personnes avec un taux d'incapacité de 50 à 79 % d'avoir accès à un minimum de ressources. Elle pouvait s’élever jusqu’à 900€ mensuels pour un célibataire. Depuis longtemps, les associations de défense des droits de personnes handicapées et les associations féministes luttaient activement pour que son attribution soit indépendante des revenus du conjoint. Une pétition avait été mise en ligne sur le site du Sénat et avait même dépassé les 100 000 signatures. C’est grâce à elle que cette proposition de loi a pu s'inscrire à l’ordre du jour de la chambre haute. En février dernier, elle fut votée à l’Assemblée nationale en première lecture, contre l’avis du gouvernement et de la majorité, avant de passer devant la commission des Affaires sociales du Sénat, le 3 mars. Philippe Mouiller, rapporteur LR confirme que, depuis sa création, l’AAH “a toujours eu un caractère hybride, entre minimum social et prestation de compensation”.

 

Un nouveau dispositif évalué à 560 millions d'euros

 

Cependant, l’abolition de ce système de calcul de l’AAH, votée par les députés, porterait le coût de ce dispositif à 20 milliards d’euros, selon Philippe Mouiller. En supprimant la prise en compte de la situation financière du conjoint dans le calcul de l'AAH, les sénateurs ont donc décidé d’apporter quelques ajustements au texte, allégeant ainsi le budget prévisionnel. Ils envisagent réintroduire le plafonnement du cumul de l’AAH avec les ressources propres du bénéficiaire. En revanche, l’article a été modifié afin que les primes versées par l'État aux sportifs de l'équipe de France médaillés aux Jeux paralympiques ne fassent plus partie du calcul du plafond de ressources d'attribution des différentes prestations sociales. Avec ces modifications, le coût de l’AAH ne s’élèverait alors plus à 20 milliards d’euros, mais à 560 millions d’euros. Contre toute attente, certaines personnes se retrouvent pénalisées par cette nouvelle loi. Une solution transitoire à destination des ménages perdants, actuellement bénéficiaires de l’AAH, sera élaborée pour répondre à cette problématique.

 

Des solutions transitoires pour les ménages perdants

 

Actuellement, 1,2 millions de Français bénéficient de l’AAH, et 270 000 d’entre eux sont en couple. La Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (Dress), estime qu’avec la nouvelle manière de calculer l’AAH, 44 000 ménages seraient perdants et que 21% d’entre eux seraient même contraints à devoir renoncer totalement à cette prestation. Une solution transitoire est donc prévue, afin de permettre à ces foyers de conserver le mode de calcul actuel pendant encore 10 ans.